Des noms graphiques, des logos même, jouant l’un et l’autre sur la répétition warholienne : deux des nouveaux groupes français les plus étonnants, et cousins, s’appellent Hyphen Hyphen et Shiko Shiko. Ces derniers viennent de Lille – on pourrait écrire l’île, tant ils semblent avoir grandi en autarcie. Loin des gens, mais avec une connexion haut débit : pourquoi sortir quand le monde peut s’inviter dans votre chambrette ? C’est ce que semble affirmer ce groupe déraciné, citoyen d’un monde parallèle, mutant, où le demain des autres est déjà son quotidien, voire son passé simple. Génération Y ? Notre alphabet paraît soudain bien désuet pour décrire ces puces électroniques et leur fatras de monstres paniqués, d’électro viciée, de rock hachuré, de pop déconstruite, qui semble revendiquer autant l’influence des Pokémon ou des jeux vidéo les plus stressants que de groupuscules comme Late Of The Pier ou Enter Shikari. Si un jour la médecine a besoin de chansons pour décrire les troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), celles de Shiko Shiko serviront de symboles : frénétiques, hilares, instables, affolées, elles fuient le repos, la logique, la raison, pour des trésors utopiques comme Christmas War ou Masca Masca.
Source : Les Inrocks, 17 décembre 2012