Mesparrow est Marion Gaume. Une jeune femme originaire de Tours, qui s’est trouvé un nom d’artiste, ou plutôt de plume («sparrow » = « moineau »), idéal pour une chanteuse prête à s’envoler. Au départ, elle se faisait appeler Miss Sparrow, Mademoiselle Moineau. Mais Marion n’est pas la môme Piaf (même si, petite, elle se rêvait parfois en chanteuse de rues). Et elle n’aimait pas les trois « s » dans Miss Sparrow. Du coup, elle en a enlevé deux, mais elle a gardé les ailes, la Tourangelle. Mesparrow, « moi Moineau ». Dans Mesparrow, il y a aussi « arrow », la flèche. Suivez-là du regard, et surtout des oreilles : elle sort son premier album, elle est sur le point d’atteindre la cible, en plein dans le mille, après une trajectoire en boucles…
Marion est devenue Mesparrow lorsqu’elle était aux Beaux-arts de Tours (après cinq ans d’études de piano, de chant et quelques groupes de rock au collège-lycée). Normalement, aux Beaux-arts, on n’apprend pas la musique. Mais il n’est pas interdit d’en faire. « Je me suis demandée si je devais choisir entre l’art et la musique. Et je me suis rendue compte que plein de choses étaient liées». C’est donc pendant son cursus universitaire, et dans les soirées étudiantes, qu’elle commence à présenter des performances voix/vidéo. « Des choses très courtes, avec ma pédale de boucles et un micro. Je superposais des respirations, des sons abstraits. En fin d’études, j’ai animé une chorale dont j’étais la seule chanteuse, avec des images de mon visage en boucle et des couches de voix. C’était le vrai début de Mesparrow ». Le moineau déploie ses ailes, puis migre à Londres. « Je voulais juste vivre là-bas, et parler anglais. Je me suis retrouvée en coloc avec des gens que je ne connaissais pas. J’ai commencé par m’enfermer dans ma chambre avec un ampli et ma pédale de boucles. Je fais tout à la voix, quand j’entendais une guitare ou une batterie, je les faisais à la voix. Les chansons sont venues comme ça ». Marion finit par sortir de sa chambre. Elle rencontre des musiciens, fait ses premiers concerts, rejoint la petite communauté anti-folk du 12 Bar Club de Soho. Elle apprend, elle prend de l’assurance, elle rôde son live. Elle tourne un peu, mais aussi en rond, sans le sou. Au bout de deux ans, retour à Tours, où tout va s’accélérer. Sur la foi de concerts tourangeaux impressionnants – seule sur scène, avec son clavier, ses boucles et sa chorale fantôme – elle est programmée au Printemps de Bourges, puis au Chantier des Francos à la Rochelle. Mesparrow n’est plus seule, elle a quitté son nid : elle emballe le public et les médias sans avoir sorti un seul disque, par l’intensité magique de ses concerts uniquement.
« En général, les artistes sortent un disque et sont attendus sur le live. Moi, c’est le contraire ». Ça valait le coup d’attendre. Mesparrow a enregistré son premier album au studio Black Box, près d’Angers. Les chansons sont celles de la scène, adaptées à l’enregistrement. « Le live, c’est toujours en évolution. L’album, c’est un vrai tournant, il fallait figer les chansons, c’était compliqué pour moi. J’ai donc gardé la ligne directrice de ma musique : la voix en boucle. Puis j’ai ajouté des instruments. Mais des ambiances, des textures, plutôt qu’un gros son de groupe ». Pour habiller ses chansons, Mesparrow fait appel à Thomas Poli (instrumentiste), musicien du groupe Montgomery (et occasionnellement guitariste de Miossec ou Dominique A). Et François, de Frànçois & The Atlas Mountains, est passé pour un beau duo chanté en français.
Mesparrow aime Billie Holiday, Barbara, PJ Harvey, Shannon Wright, les Doors, Cat Power, Patti Smith, un album de chants Inca et tout un tas d’autres choses. Mais ça ne s’entend pas forcément. Ce qu’elle partage avec ses idoles, c’est une personnalité musicale singulière, le goût des expériences, une voix qui transporte les émotions. Du coup, les étiquettes ne collent pas sur ses chansons. C’est de la pop au sens large. De la musique d’aujourd’hui, avec une histoire qui remonte au gospel, au cabaret et au vécu. C’est de la soul blanche, de la musique du corps, qui vient des tripes, remonte et s’affine le long des cordes vocales. Cet album, c’est autre chose que le live, mais c’est beaucoup plus qu’une cage dorée pour les chansons indomptables de Mesparrow. C’est un moment important, qu’elle veut garder en vie, Keep This Moment Alive.
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